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La voiture électrique, électrochoc en cours
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kate

The Good Business

La voiture électrique, électrochoc en cours

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Elle a ses aficionados, persuadés qu’elle est « la » solution d’avenir. Et ses détracteurs qui jugent son empreinte carbone toujours (trop) néfaste. Mais, au juste, où en est la voiture électrique et à quoi faut‑il s’attendre ? Enquête The Good Life.

Voilà plus de 120 ans que le moteur thermique sévit et évolue à grand renfort d’accessoires. Refroidissement liquide, injection, turbo… Les tromblons asthmatiques, étouffant l’atmosphère des années 1900, ont laissé place à des unités plus économes, moins polluantes. Mais consommant toujours une quantité de carburant importante pour un rendement final d’à peine 30 % d’énergie délivrée aux roues. Face à lui, le moteur électrique prend une autre mesure. Plus petit – à puissance fournie égale –, plus léger, il est, surtout, beaucoup plus performant, avec un rendement de l’ordre de 90 %. Il s’épargne l’usage de boîtes de vitesses lourdes et propices à la déperdition d’énergie et offre une puissance instantanée, sans inertie. La voiture électrique : que des atouts en somme ? Ce serait si simple…

Superchargeur chez Tesla.
Superchargeur chez Tesla. DR

Une technologie encore jeune

Qui dit moteur électrique, dit batterie pour l’alimenter en énergie. Et c’est ici que le bât blesse. Pour fournir du « jus » à une voiture électrique, il faut recourir à de gros accumulateurs, lourds, qui pis est longs à recharger. Et ce, avec une chaîne de production qui réclame des terres rares à l’empreinte écologique nocive et difficilement recyclables. Pas tout à fait le « zéro émission » promis. Cependant, la conception de la voiture électrique (VE) n’en est encore qu’à ses prémices. Tesla, pionnier en la matière, n’a qu’une dizaine d’années d’expérience. Et les plus grands constructeurs de la planète viennent tout juste de lui emboîter le pas.

Bornes CCS Combo.
Bornes CCS Combo. Mario Gutiérrez / GettyImages

L’investissement dans la VE est tout simplement gigantesque. Les travaux de développement dans tous les domaines le sont tout autant. Les batteries bien sûr, mais aussi les motorisations, l’électronique de puissance, le ­refroidissement, etc. De nombreuses entreprises participent à ce mouvement général aux côtés de l’industrie automobile, avec un premier effet : la chasse aux experts et des recrutements massifs dans ce domaine. Certaines marques commençant même à se lancer dans la construction de leurs propres unités de fabrication de batteries. L’autre conséquence est l’avancée spectaculaire des technologies. D’abord sur les moteurs : pour accroître leur rendement, les travaux portent sur le dégagement de chaleur provoqué par le bobinage.

Longueur du temps de recharge

Fils de cuivre à section rectangulaire, carter avec circulation d’eau conçu en polymère (et non en métal)… Les premiers résultats aboutissent à des moteurs plus performants et plus économes, plus légers, plus petits et plus simples à fabriquer. Donc moins chers et favorisant une baisse du prix de revient du véhicule pour les constructeurs et pour les acheteurs. L’électronique de puissance est l’autre axe de développement majeur, notamment le boîtier d’interconnexion. Ce dernier gère la distribution d’énergie à la bonne intensité, soit à la batterie, soit au moteur, soit aux équipements du véhicule. Selon les modèles, les constructeurs proposent ainsi un réglage du système de recharge lors des décélérations, soit par bouton, soit par le biais des palettes au volant pour en augmenter ou réduire l’intensité. L’une des plus grandes entraves au développement de la VE, outre l’autonomie réduite, réside dans le temps de recharge qu’elle réclame.

La Chine, premier marché mondial

Elon Musk et ses Tesla font beaucoup parler d’eux. Mais c’est un peu vite oublier la Chine. Premier marché automobile mondial, il est également celui qui absorbe le plus de VE : 1,3 million d’unités vendues sur son territoire en 2018, soit une croissance annuelle de 62 %. Cette dynamique est soutenue par les généreuses déductions fiscales accordées aux acheteurs, et par les quotas imposés pour la fabrication de voitures électrifiées à tous les constructeurs du pays. Ainsi, le pays accapare à lui seul plus de la moitié des ventes mondiales (56 %) de VE. Atypique, ce marché est trusté, à 90 %, par des géants industriels comme BYD, SAIC, BAIC…

Tesla a d’ailleurs décidé d’investir dans une usine à Shanghai, dès cette année, afin de renforcer sa présence en République populaire. Et concurrencer davantage les nombreuses marques chinoises. A l’exemple de NIO, un challenger de taille qui compte déjà dans sa gamme un SUV 5-places (ES6), un SUV 7-places (ES8) et une supercar (EP9), et qui vise prochainement les marchés européens. L’américain compte la contrer notamment avec son nouveau SUV Model Y, basé sur plate-forme de Model 3, dont l’arrivée est programmée l’année prochaine.

Bornes CHAdeMOpour Nissan et Mitsubishi. la norme créée par le consortium des constructeurs européens –, la recharge standardisée des véhicules électriques n’est pas encore à l’ordre du jour.
Bornes CHAdeMOpour Nissan et Mitsubishi. la norme créée par le consortium des constructeurs européens –, la recharge standardisée des véhicules électriques n’est pas encore à l’ordre du jour. Mario Gutiérrez / GettyImages

Sensibles aux températures extrêmes

Dernier écueil, celui des températures. En période de canicule, les chargeurs peuvent se révéler moins rapides. Certains, peu protégés du soleil dans les stations, se montrant même inefficients au-delà d’un certain niveau de charge. Le froid constitue aussi une contrainte majeure pour le bon fonctionnement d’une VE. Chez de nombreux constructeurs, les ingénieurs mènent le développement de leurs VE dans les pays nordiques afin de soumettre leurs composants à des conditions extrêmes. Ils analysent la manière dont les très basses températures, largement inférieures à 0 °C, affectent la recharge des batteries, la manière dont l’électricité est transférée au moteur, l’alimentation du système électrique, et le comportement de la climatisation et du chauffage.

Certains préviennent même que l’autonomie de leur VE se réduit en hiver, comme Renault qui annonce un rayon d’action maximal de 300 km pour sa Zoé en été et de 200 km en hiver. Une contrainte – partiellement – résolue grâce aux systèmes de gestion de la température de la batterie. Selon qu’il soit réalisé par l’air ambiant, par air forcé (climatisation) ou par un liquide, ce refroidissement participe au maintien d’une température de fonctionnement optimale et donc à une meilleure autonomie.

Une vision différente

Cette problématique constitue le principal obstacle de la VE. Toutefois, en pilotant à distance la recharge, il devient possible de programmer sa climatisation sans puiser dans les batteries. On peut également surveiller le niveau de charge de la voiture et la capacité disponible sur son smartphone. Certaines applications, en lien avec le GPS, indiquent même la quantité d’énergie nécessaire pour réaliser un trajet. Elles montrent aussi les bornes de recharge disponibles sur le parcours et le temps de charge nécessaire si les accumulateurs faiblissent. Ces applications viennent tempérer les habitudes prises avec les voitures thermiques. Nombre de conducteurs attendent que leur réservoir soit vide pour faire un plein de carburant qui ne réclame que quelques minutes.

Pour piloter la recharge de la batterie ou trouver des stations de recharge sur son trajet, il suffit de posséder un smartphone et de télécharger l’application idoine.
Pour piloter la recharge de la batterie ou trouver des stations de recharge sur son trajet, il suffit de posséder un smartphone et de télécharger l’application idoine. DR

Conduire une voiture électrique réclame une vision différente. Une batterie à plat met beaucoup plus de temps à se « remplir » qu’une batterie à moitié vide. Une borne de recharge sur un parcours différent ou sur un parking situé quelques mètres plus loin peut être plus efficace que celle immédiatement disponible. Il faut garder un œil sur son niveau de charge et s’arrêter sur une aire d’autoroute 20 minutes toutes les 2 heures. Cela permet, avec les dernières générations de batteries et de chargeurs rapides, d’enchaîner les kilomètres. Autant de nouvelles habitudes qui aboutiront à une voiture électrique prête à enchaîner les virages technologiques et à une circulation plus propre.


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