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Dallas, renaissance d’une ville
Bien desservie, dynamique et accueillante, la ville de Dallas a su se diversifier et n’a pas vu passer la crise.
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The Good Business

L’art et le sport, les vecteurs gagnants de Dallas

The Good Business

Avec des millions de dollars injectés dans l’art, le sport, voire les deux en même temps, les tycoons de Dallas offrent un nouveau visage à leur ville. La faisant entrer dans le cercle très fermé des hubs de l’art.

Ils sont 22 multimilliardaires de Dallas en bonne place dans le classement Forbes des 500 plus grandes fortunes de la planète. Mais, au total, ils sont près de 1 000 à posséder au moins un milliard de dollars sur leur compte, qui leur permet de faire la pluie et le beau temps dans le monde du sport, de l’urbanisme et de l’art. Halte aux clichés : ils ne portent pas tous le fameux Stetson. Il est révolu le temps des derricks et des rois du pétrole. Enfin presque ! Quelques magnats des oil companies sont encore là, mais ils ont troqué le chapeau de cow-boy et les bottes pour le style bling-bling. Après l’or noir, une flambée plus chic propulse « Big D » sur la scène mondiale de l’art contemporain. Ils ont pour nom Nasher, Jones, Perot, Headington, Rachofsky, Crow…

The Warehouse, la galerie d’Howard Rachofsky, rassemble un bon millier d’œuvres.
The Warehouse, la galerie d’Howard Rachofsky, rassemble un bon millier d’œuvres. Vasantha Yogananthan
The Warehouse, la galerie d’Howard Rachofsky, rassemble un bon millier d’œuvres.
The Warehouse, la galerie d’Howard Rachofsky, rassemble un bon millier d’œuvres. Vasantha Yogananthan

A chacun son musée, sa collection d’art, son parc ou son bâtiment signé par un grand nom de l’architecture. Raymond Nasher a son musée de la sculpture. Ross Perot, fondateur d’Electronic Data Systems et ex-candidat à l’élection présidentielle, possède son musée de la science. Trammell Crow, figure locale du marché de l’ameublement, a son musée d’art d’Extrême-Orient. Howard Rachofsky et sa femme Cindy ont décidé, avec deux autres couples richissimes amateurs d’art contemporain – Marguerite et Robert Hoffman, Deedie et Rusty Rose –, de léguer, après leur mort, leurs collections au Dallas Museum of Art. Shanghai, New York, Londres ou Los Angeles n’ont qu’à bien se tenir. Même l’aéroport s’y met. Les responsables ont investi une dizaine de millions de dollars dans une cinquantaine d’œuvres pour embellir les terminaux. Sans compter les grands groupes comme AT&T.

L’AT&T Performing Arts Center, né en 2009, est en partie signé Norman Foster (Pritzker 1999).
L’AT&T Performing Arts Center, né en 2009, est en partie signé Norman Foster (Pritzker 1999). Vasantha Yogananthan

Capitale de la philanthropie

Les Texans croient « dur comme or » en la réalité de leurs désirs. Plus généreux encore que leurs cousins de New York, ils ont inventé un nouveau concept : le « citizen billionaire ». Traduction : le citoyen milliardaire. « Dallas est la capitale de la philanthropie aux États-Unis », souligne le banquier Richard Fischer. Dans leur esprit, c’est un devoir civique : rendre à la communauté ce qu’elle vous a donné. Melinda Gates, l’épouse du patron de Microsoft, née à Dallas, a sans doute hérité de cet ADN. Même si elle n’habite plus au Texas. Elle est aujourd’hui la plus grande philanthrope du monde. Le secteur privé endosse le rôle de service public en finançant sur leurs fonds une bonne part des institutions culturelles, des hôpitaux, des églises, de la restauration des bâtiments historiques, des écoles, des universités et des aménagements urbains. Parmi ces philanthropes, dont la plupart ont créé des fondations, on trouve beaucoup de femmes, de mères, d’épouses ou de filles de milliardaires. Exemples : Ruth Hunt, mère du patron de la Hunt Oil Company, mais aussi Margaret Hunt, qui joua un rôle important dans l’engagement civique pour la ville. Un pont porte d’ailleurs son nom. Une autre Margaret, surnommée « la Reine de la philanthropie », est tout aussi engagée dans la vie locale. Il s’agit de Margaret McDermott, la veuve du fondateur de Texas Instruments. Les McDermott ont beaucoup contribué à l’éducation et aux universités, mais aussi à la culture musicale et théâtrale. « Write a cheque » : c’est de façon franche et directe que la mécène Deedie Rose, l’un des personnages centraux de la culture à Dallas, fait la tournée des riches fortunes pour financer les différents espaces culturels du centre-ville. A proximité du Dallas Museum of Art, le milliardaire Kelcy Warren, le puissant patron d’Energy Transfer Partners, spécialisé dans les réseaux de gaz et de propane, a fait aménager un grand parc au-dessus d’une bretelle d’autoroute qui divisait la ville en deux, Uptown et Downtown, pour le plus grand plaisir des enfants et des familles du quartier. Robert Hoffman, patron du Coca-Cola Bottling Group (Southwest) Inc., s’est, lui, engagé dans le soutien au développement urbanistique de Dallas, en particulier pour l’Arboretum et la Botanical Society. A la différence des chefs d’entreprises français, c’est moins la fiscalité que l’esprit civique, la respectabilité, l’éthique protestante et le besoin de culture qui les animent.

Le Nasher Sculpture Center, créé par Raymond Nasher et dessiné par Renzo Piano (prix Pritzker 1998), a été inauguré en 2003.
Le Nasher Sculpture Center, créé par Raymond Nasher et dessiné par Renzo Piano (prix Pritzker 1998), a été inauguré en 2003. Vasantha Yogananthan

Revitalisation de la ville

Dallas est en train de s’imposer comme un nouveau hub pour les galeristes, les créateurs et les amateurs d’art. « Le bon miroir pour le futur de Dallas, c’est la culture », souligne Philip J. Jones, patron du Dallas Convention & Visitors Bureau. Il y a actuellement un mouvement de revitalisation des villes par le high-tech, mais aussi par l’esthétique. Il faut dire que tous les ingrédients sont là : d’abord l’argent, ensuite l’espace, enfin l’architecture. Tout cela forme un bon vecteur de tourisme. Objectif : faire de Dallas une cité nettement plus fréquentable. « Dans dix ans, Downtown Dallas sera aussi important pour l’art contemporain que New York, Los Angeles et Shanghai. »

Howard Rachofsky sait de quoi il retourne. Sa galerie, baptisée The Warehouse, occupe un immense entrepôt refait à neuf sur Inwood Road, non loin de Love Field Airport, le second aéroport de la ville. Il rassemble un bon millier d’œuvres. Cette magnitude artistique a un impact direct sur la physionomie de la ville. Avec la construction de l’AT&T Performing Arts Center dans l’Arts District du centre-ville, Dallas devient la seule ville dans le monde qui aura quatre bâtiments dans un même secteur, tous conçus par des gagnants du prix Pritzker d’architecture. Avec Main Street et West End, Flora Street, l’esplanade des musées, est un pas de plus pour donner à la driving city une allure piétonnière.

Le Perot Museum of Nature and Science, ouvert en 2012, est signé Thom Mayne (Pritzker 2005).
Le Perot Museum of Nature and Science, ouvert en 2012, est signé Thom Mayne (Pritzker 2005). Vasantha Yogananthan

Le sport-business : une valeur populaire

AT&T Stadium, Dallas

Avec l’explosion de la valeur des franchises sportives, de nombreux tycoons ont acquis des équipes sportives. Le sport est un bon ticket pour véhiculer l’image de la ville. Opérer des rachats dans les quatre grandes organisations sportives – les ligues NHL (hockey sur glace), NBA (basket-ball), NFL (football américain) et MLB (baseball) – est une passion pour certains. Et Dallas est l’une des rares villes des États-Unis qui possède des équipes professionnelles. « Art et business vont de plus en plus ensemble », souligne le collectionneur d’art Howard Rachofsky. Exemple : le stade de football des Dallas Cowboys (105 000 places), le club de sport le plus riche du monde. Il appartient à l’empire de Jerry Jones, qui a commencé dans le pétrole. Convaincu que l’art peut enrichir les gens qui viennent assister aux matches et qui ne vont pas au musée, il a investi une fortune dans l’AT&T Stadium pour sensibiliser les supporters de l’équipe de football américain à l’art moderne. Coût du projet : 1,2 Md €. Sa fille, Charlotte Jones Anderson, est chargée de gérer l’ensemble de la fondation et de développer le marketing des Dallas Cowboys. Autre gloire locale, Marc Cuban. Après avoir fait fortune dans le développement d’Internet, la diffusion de jeux vidéo et la télévision satellite, le flamboyant entrepreneur a investi une partie de son argent dans l’équipe de basket des Dallas Mavericks. C’est aujourd’hui un autre milliardaire, Ray Davis, cofondateur de la compagnie Energy Transfer Partners, qui copréside aux destinées du baseball de Dallas. Sans oublier un homme, aujourd’hui décédé, qui a marqué le sport à Dallas et au-delà : Lamar Hunt, l’un des fils du sulfureux magnat du pétrole Haroldson Lafayette Hunt. Il a joué un rôle de premier plan dans le développement de la NFL et est l’un des fondateurs du circuit Open de tennis.

L’intégralité de notre dossier Dallas à découvrir dans le numéro spécial 5 ans de The Good Life, le 10 novembre en kiosques.

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