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Système solaire, un infini de moins en moins méconnu
Système solaire, un infini de moins en moins méconnu.
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The Good Business

Le système solaire se dévoile de plus en plus

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Menée tambour battant, la recherche d’exoplanètes retient souvent l’attention. Pourtant, depuis deux ans, jamais notre système solaire n’a été autant exploré. Tour d’horizon des nouveaux paysages entrevus par les sondes et des découvertes qui pourraient bien être déterminantes pour l’avenir de la Terre.

Mercure, au plus près du Soleil
Le 30 avril 2015, un engin d’une tonne s’est écrasé sur la face cachée de Mercure à la vitesse de 14 000 km/h, créant un nouveau cratère de 16 m de diamètre. Il s’appelait Messenger, et venait de passer quatre ans en orbite autour de la planète la plus proche du Soleil afin de la révéler avec des détails jusqu’alors inconnus. Avant Messenger, seule une sonde avait rendu visite à Mercure. Celle-ci n’avait observé qu’un seul de ses hémisphères, car la planète, qui tourne lentement sur elle-même, présente la plupart du temps la même face au Soleil. Les images reçues sur Terre montrent un astre qui ressemble furieusement à la Lune. Sa surface est constellée de cratères d’impacts de toutes tailles et est apaisée par d’immenses plaines volcaniques qui font penser aux mers lunaires, ces taches sombres qu’on aperçoit sur notre satellite quand il est en phase pleine. L’une des plus grandes surprises est venue du pôle Nord : là, alors que la température diurne affiche en moyenne 430 °C, de la glace d’eau a été trouvée au fond d’un cratère. De la glace sur Mercure, alors qu’il y fait quasiment deux fois plus chaud que dans un four ! Personne ne s’y attendait. Mais comme les rayons du Soleil n’atteignent jamais le fond de ce cratère, il y fait en permanence – 220 °C. Ce n’est pas le seul endroit qui recèle un tel trésor. D’après les estimations, le stock de glace qui se trouve sur l’ensemble du pôle Nord pourrait avoisiner les 1 000 milliards de tonnes, soit l’équivalent du lac Ontario, en Amérique du Nord.

Le 9 mai 2016, Mercure est passée devant le soleil (le tout petit point noir). Un événement rare et une planète qui paraît minuscule…
Le 9 mai 2016, Mercure est passée devant le soleil (le tout petit point noir). Un événement rare et une planète qui paraît minuscule… Wikimedia

Vénus, bienvenue en enfer
Panne sèche. En décembre 2014, la sonde Venus Express a fini d’utiliser le carburant qui la maintenait depuis huit ans en orbite autour de la plus proche voisine de la Terre. Tout en continuant à tourner, elle s’est lentement rapprochée de la belle sphère striée d’orange et de blanc, avant de plonger dans son atmo­sphère épaisse et étouffante, où les vents rugissent à plus de 400 km/h. Que nous a-t-elle appris sur ce monde infernal, le plus chaud du système solaire ? D’abord, que certains des milliers d’édifices volcaniques qui s’élèvent à sa surface sont encore actifs, ce qui est assez rare dans le système solaire. Chose encore plus étonnante : Venus Express a trouvé de l’eau dans l’atmosphère de la planète, alors qu’il y règne en moyenne un bon 460 °C. D’après les observations, ces quantités d’eau ont été bien plus importantes dans le passé, au point qu’elles formaient un océan. Voilà qui épaissit encore le mystère de l’histoire de Vénus, considérée comme une jumelle de la Terre. Même taille, même masse, une distance raisonnable par rapport au Soleil : elle aurait pu abriter la vie si son effet de serre ne s’était pas emballé au point de la rendre irrespirable. Aujourd’hui, son atmosphère, constituée à 96 % de dioxyde de carbone, retient le rayonnement infrarouge émis par la surface de la planète, entretenant ainsi une chaleur torride.

Mars, à la recherche de l’eau perdue
Ce devait être « le » résultat que tout le monde attendait depuis des décennies. En septembre 2015, la Nasa a annoncé que, cette fois, on avait vraiment trouvé de l’eau liquide sur Mars. Il ne s’agit pas d’une mare ou d’un ruisseau, mais de traces d’eau qui apparaissent et disparaissent sur les parois de certains cratères. Si on pouvait la goûter, elle serait sans doute aussi agréable à boire que l’eau de la mer Morte, car elle est saturée de sel. La découverte a été faite par la sonde Mars Reconnaissance Orbiter, qui tourne autour de la planète rouge depuis 2006. Elle n’est pas la seule : quatre autres engins sont placés en orbite autour de Mars afin d’en étudier son atmosphère et sa surface. Le plus incroyable est que, sur ce monde hostile où les températures oscillent entre – 140 et 0 °C, deux rovers continuent d’arpenter la région où ils se sont posés. Opportunity se trouve depuis douze ans à proximité du cratère Endeavour, et Curiosity, arrivé en 2012, explore le cratère Gale, dont les structures géologiques montrent que de l’eau a autrefois coulé en abondance à cet endroit. D’après les connaissances acquises par les différentes missions et les observations ­terrestres, on sait qu’un vaste océan, aussi large que l’Atlantique et profond d’au moins 140 m, recouvrait la planète rouge il y a quatre milliards d’années. Dans ce contexte, la vie a pu apparaître… C’est ce qu’essaiera de déterminer la mission Exomars, dont le premier volet arrivera au mois d’octobre. Le second volet est prévu pour 2018.

Et si, comme Julien Mauve l’a prédit dans sa série « Greetings from mars », nous prenions un jour la pause sur la planète rouge ?
Et si, comme Julien Mauve l’a prédit dans sa série « Greetings from mars », nous prenions un jour la pause sur la planète rouge ? Julien Mauve

Les surprises de Cérès
Avec un diamètre de 950 km, Cérès est le plus grand corps de la ceinture d’astéroïdes qui se trouve entre Mars et Jupiter. Elle a été découverte en 1801 par l’astronome italien ­Giuseppe Piazzi, qui pensait avoir affaire à une nouvelle planète. Mais comme d’autres objets de taille importante furent observés dans cette région, elle fut reléguée au rang d’astéroïde. Cependant, en raison de sa masse assez importante et de son indéniable rondeur, Cérès a fini par être classifiée, en 2006, en tant que planète naine, tout comme Pluton. Depuis un peu plus d’un an, elle voit orbiter autour d’elle la sonde américaine Dawn, qui est auparavant passée voir Vesta, un autre gros objet de la ceinture d’astéroïdes ni tout à fait rond, ni tout à fait informe. En descendant sur Cérès jusqu’à 380 km d’altitude, Dawn a révélé des détails d’une grande précision, dont une surface ponctuée de cratères d’impacts. Le sol, noir comme du bitume, a-t-il été en partie lissé par de la glace, qui pourrait se trouver un peu plus en profondeur ? Deux structures ont par ailleurs retenu l’attention des scientifiques : une montagne isolée s’élevant à 4 km au-dessus des plaines qui l’entourent, ainsi que de larges points blancs situés dans le cratère Occator. S’agit-il de glace ou d’une plaque de sel ? Il semblerait que les scientifiques penchent pour la seconde idée.

Comète Tchouri, en quête des origines
Voilà bientôt deux ans que la sonde européenne Rosetta a rejoint Tchouri, la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko, un bolide alors lancé à 135 000 km/h dans sa course autour du Soleil. L’engin a réussi la prouesse de se satelliser autour de la voyageuse et continue d’envoyer des images saisissantes de son activité. Jusqu’alors, on n’avait qu’une vision lointaine des ­comètes, longtemps considérées comme des « boules de neige sale ». En réalité, ces objets se ­révèlent plus complexes sous l’œil de ­Rosetta. Sur Tchouri, qui a vaguement la forme d’une cacahuète boursouflée de 4 km de long, on trouve des plaines, des montagnes, des falaises de 900 m de haut, des éboulements, et même un impact de météorite, tout cela sculpté dans une matière noire comme de la suie. En novembre 2014, Rosetta a largué un petit robot, Philae, qui devait faire des mesures in situ afin de savoir de quels matériaux est constituée la comète. Lors de son atterrissage, ce dernier a rebondi et s’est ­encastré dans le recoin d’un canyon perpétuellement à l’ombre, ce qui a privé ses panneaux solaires d’énergie et l’a plongé dans une hibernation à durée indéterminée. Malgré tout, Rosetta est quand même parvenue à lever un voile sur l’origine des ­comètes. D’après les mesures effectuées dans les glaces cristallines qui forment le noyau, Tchouri s’est formée en même temps que le système solaire, il y a 4,6 milliards d’années.

La comète Tchoury photographiée par la sonde Rosetta en septembre 2014.
La comète Tchoury photographiée par la sonde Rosetta en septembre 2014. Wikimedia

Pluton, une planète naine très spéciale
Il a fallu dix ans à la sonde américaine New Horizons pour se rendre là où aucune mission ne s’était aventurée jusqu’alors : sur la mystérieuse Pluton, découverte sur le tard, en 1930, non pas à l’aide d’un télescope, mais d’après des photos du ciel patiemment ­examinées par un fermier du Kansas devenu astro­nome, Clyde Tombaugh. ­Hormis une vague image pixelisée, personne ne savait vraiment à quoi ressemblait cette planète, qui a été rétrogradée au rang de naine en 2006 parce que d’autres objets de la même taille ont été découverts dans ses environs. On supposait qu’à l’instar des petits corps qui peuplent la ceinture de Kuiper, aux confins du système solaire, elle était couverte de glace. A quoi d’autre s’attendre par – 240 °C ? L’une des surprises révélées par New Horizons ­mesure 4 km de haut, 160 km de diamètre, et son sommet est enfoncé comme s’il était occupé par un cratère. Un volcan ? Oui, mais un volcan spécifique, qui cracherait une glace faite d’eau, d’ammoniaque et d’azote. Par ailleurs, en prenant Pluton à contre-jour, la sonde a montré l’image incroyable d’une sphère noire entourée de bleu. Comme sur Terre, le ciel plutonien prendrait cette ­couleur azuréenne parce que la lumière du Soleil se ­réfracte dans des particules présentes dans l’atmosphère. Car la planète naine possède une véritable atmosphère, ce que n’ont ni la Lune ni Mercure. Autour d’elle tournent également cinq satellites, dont l’imposant Charon, qui occupe dans le ciel sept fois plus de place que la Lune. New Horizons a découvert qu’il avait des pôles de couleur rouge, des montagnes, ainsi que d’immenses canyons de glace. Après le survol, en juillet 2015, de ces mondes extraordinaires, la sonde continue sa route vers la ceinture de Kuiper. Prochain rendez-vous en 2019, avec un petit objet glacé immatriculé 2014MU69.

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